Parce que Le Monde ne voit pas de guerre entre l’UE et la Chine

Parce que Le Monde ne voit pas de guerre entre l'UE et la Chine

La Commission européenne se concentre désormais sur la réduction des risques, loin du découplage technologique que les États-Unis ont initié avec la Chine. L'article du journal français Le Monde

La volonté des Européens de réduire leur dépendance commerciale croissante à l'égard de la Chine sera l'un des sujets abordés lors du sommet de Pékin les 7 et 8 décembre. Il écrit Le Monde .

Le chiffre est impressionnant et obsède les Européens depuis quelques mois : 400 milliards d'euros. Il s'agit du déficit commercial de l'Union européenne avec la Chine en 2022, "le plus élevé de l'histoire", comme l'a souligné la présidente de la Commission Ursula von der Leyen dans un discours à Berlin le 16 novembre. « En 2019, il n'était que de 180 milliards d'euros : sa croissance rapide est préoccupante », analyse Sébastien Jean, spécialiste du sujet au Conservatoire national des arts et métiers.

Ce déficit illustre surtout un paradoxe : à l’heure où les Européens cherchent à réduire leur dépendance à l’égard de la Chine, ils n’ont jamais été aussi étroitement liés à celle-ci. Ce sujet sera l'un de ceux à l'ordre du jour du sommet UE-Chine qui se tiendra les 7 et 8 décembre à Pékin, dans un contexte de tensions croissantes entre les deux parties et d'incertitudes géopolitiques.

Ces derniers mois, les dirigeants du Vieux Continent ont multiplié les visites à Pékin et fait des déclarations fortes. « La confiance mutuelle a été ébranlée », a déclaré le 13 octobre le haut représentant de l'UE pour les affaires étrangères, Josep Borrell. L'UE et la Chine ne doivent pas craindre des « discussions difficiles », a déclaré le 10 novembre Thierry Breton, commissaire chargé du marché intérieur. "L'Europe adopte une position beaucoup plus agressive", a déclaré Laurent Malvezin, co-fondateur de Sinopole, un groupe de réflexion sur l'économie chinoise.

Le 13 septembre, la Commission a ouvert une enquête sur les subventions accordées aux voitures électriques dans le pays. Compte tenu de la taille du marché, il s'agira probablement de la plus grande enquête de son histoire », note Philippe Dauba-Pantanacce, responsable des recherches géopolitiques chez Standard Chartered. D'autres pourraient suivre, par exemple sur les éoliennes.

Leader dans la fourniture de biens

Revenons au déficit de 400 milliards d'euros. "Ils sont le résultat délibéré de la politique chinoise", a critiqué Ursula von der Leyen le 16 novembre, évoquant les subventions massives de l'Empire du Milieu à certains secteurs et les surcapacités industrielles. «Malgré tous les discours sur un rééquilibrage vers la consommation, le modèle économique chinois reste largement axé sur la production, qui est fortement soutenue», explique François Chimits, chercheur au Mercator Institute for China Studies. En conséquence, le pays de Xi Jinping exporte ses déséquilibres – et donc ses produits subventionnés à bas prix – vers le reste du monde.

Et au détriment de ses industries partenaires. Au début des années 2010 déjà, l’industrie européenne des panneaux solaires avait été anéantie par les importations de panneaux chinois bon marché. « Aujourd'hui, l'Europe dépend aussi de la Chine pour les terres rares et les minéraux essentiels à la transition verte », ajoute Elvire Fabry de l'Institut Jacques Delors. Et Pékin reste de loin notre principal fournisseur de biens. »

Cependant, cette dépendance varie d'un pays à l'autre. «C'est d'abord une histoire allemande», explique Agathe Demarais du Conseil européen des relations étrangères, un groupe de réflexion indépendant. En effet, les exportations de nos voisins vers l'Empire du Milieu représentent l'équivalent de 3 % de leur produit intérieur brut – soit le double du nôtre – et 20 % des revenus de ses géants industriels, notamment automobiles. Un exemple : jeudi 30 novembre, Mercedes-Benz et BMW ont annoncé la création d'une joint-venture pour construire un réseau de recharge commun dans le pays, leur plus grand marché, dans l'espoir d'en garder le contrôle. « Les relations commerciales sont également fortes entre la Chine et l'Europe centrale, mais beaucoup moins avec l'Europe du Sud », ajoute Sébastien Jean.

Outils de défense commerciale

Consciente de ces dépendances, la Commission se concentre désormais sur la réduction des risques, loin du découplage technologique que les États-Unis ont initié avec leur grand rival. En juin, il a présenté sa « stratégie de sécurité économique », visant à renforcer les contrôles sur les investissements étrangers et les exportations de technologies critiques. Cela renforcera la panoplie d’outils de défense commerciale mis en place depuis 2019, lorsque l’UE a reconnu la Chine comme un « rival systémique ». « L'Europe a connu un véritable changement de paradigme, en rupture avec un ordolibéralisme rigide », observe François Chimits.

Dans ce contexte, les entreprises opérant en Chine sont "préoccupées par l'imprévisibilité dont a fait preuve le gouvernement communiste après la pandémie de Covid-19", résume Jean-François Di Meglio, président du centre de recherche indépendant Asia Centre. Certains conservent le marché chinois, comme l’industrie automobile allemande ou le secteur du luxe français. D’autres se sont lancés dans une stratégie de diversification pour réduire leur dépendance. Selon une enquête récente de la Banque centrale européenne, 42 % des multinationales basées dans l’UE prévoient de déplacer leurs approvisionnements vers des pays « amis » au cours des cinq prochaines années. Les deux tiers citent la Chine comme une source potentielle de problèmes dans ce domaine.

Vont-ils aller plus loin ? "La difficulté réside dans le fait que les Etats membres n'ont pas de position alignée sur cette question : cela complique considérablement la stratégie commune de de-risking", estime Agathe Demarais. « Par ailleurs, les capitaux doivent s'entendre sur le modèle industriel et de compétitivité que l'UE doit suivre pour avancer sur ces questions », ajoute Elvire Fabry.

Lors du sommet des 7 et 8 décembre, les Européens tenteront cependant de faire comprendre aux autorités chinoises que leur politique de sécurité économique ne signifie pas un protectionnisme agressif envers la Chine et qu'elles privilégient le dialogue sans s'aligner sur les Etats-Unis. « Au-delà de cela, il est probable que rien de très concret ne sortira de ces rencontres », déplore Jean-François Di Meglio.


Cet article est une traduction automatique de la langue italienne d’un article publié sur le magazine Début Magazine à l’URL https://www.startmag.it/mondo/ue-cina-guerra-commerciale-le-monde/ le Thu, 07 Dec 2023 06:29:38 +0000.